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mandement. Alors le capitaine s’est retiré dans sa cabine, et on ne l’a plus revu.

Le lieutenant Roussin s’avance vers la cabine et trouve le capitaine Villougby à une table, sur laquelle est encore un pot de grog et trois verres. Il a un bras et une cuisse emportés. Devant lui, son premier lieutenant, Thomson, est tué d’un biscaïen qui lui traverse la poitrine ; et à ses pieds est couché son neveu Williams Murrey, blessé au flanc d’un éclat de mitraille.

Alors le capitaine Villougby, de la main qui lui reste fait un mouvement pour rendre son épée ; mais le lieutenant Roussin à son tour étend le bras, et saluant l’Anglais moribond :

— Capitaine, dit-il, quand on se sert d’une épée comme vous le faites, on ne rend son épée qu’à Dieu !

Et il ordonne aussitôt que tous les secours soient prodigués au capitaine Villougby. Mais tous les secours furent inutiles : le noble défenseur de la Néréide mourut le lendemain.

Mais le lieutenant Roussin fut plus heureux à l’égard du neveu qu’il ne l’avait été à l’égard de l’oncle. Sir Williams Murrey, atteint profondément et dangereusement, n’était cependant pas frappé à mort. Aussi le verrons-nous reparaître dans le cours de cette histoire.


III.

TROIS ENFANTS.


Comme on le pense bien, les Anglais, pour avoir perdu quatre vaisseaux, n’avaient pas renoncé à leurs projets sur l’île de France ; tout au contraire, ils avaient maintenant à la fois une conquête nouvelle à faire et une vieille défaite à venger. Aussi, trois mois à peine après les événements que nous venons de mettre sous les yeux du lecteur, une seconde lutte non moins acharnée, mais qui devait avoir des résultats bien différents, avait en lieu au Port-Louis même, c’est-à-dire