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Page:Dumas - Joseph Balsamo, Lévy frères, 1872, volume 3.djvu/169

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apprenant la nouvelle, a jeté des cris déchirants. Madame la dauphine, qui se préparait à partir pour Marly, reste à Trianon, afin d’être plus à portée de venir au secours des malheureux.

— Ah ! vraiment ? dit Rousseau.

— Oui, mon cher philosophe, et l’on ne parle ici que de la lettre écrite par le dauphin à M. de Sartines.

— Je ne la connais pas.

— C’est à la fois naïf et charmant. Le dauphin reçoit deux mille écus de pension par mois. Ce matin son mois n’arrivait pas. Le prince se promenait tout effaré, il demanda plusieurs fois le trésorier, et celui-ci ayant apporté l’argent, le prince l’envoya aussitôt à Paris avec deux lignes charmantes à M. de Sartines, qui me les a communiquées à l’instant.

— Ah ! vous avez vu aujourd’hui M. de Sartines ? dit Rousseau avec une espèce d’inquiétude ou plutôt de défiance.

— Oui, je le quitte, répliqua M. de Jussieu un peu embarrassé, j’avais des graines à lui demander ; en sorte, ajouta-t-il très vite, que madame la dauphine reste à Versailles pour soigner ses malades et ses blessés.

— Ses malades, ses blessés ? dit Rousseau.

— Oui, M. Gilbert n’est pas le seul qui ait souffert, le peuple n’a payé cette fois qu’un impôt partiel à la catastrophe : il y a, dit-on, parmi les blessés, beaucoup de personnes nobles.

Gilbert écoutait avec une anxiété, une avidité inexprimables ; il lui semblait à tout moment que le nom d’Andrée allait sortir de la bouche de l’illustre naturaliste.

M. de Jussieu se leva.

— Voilà donc la consultation faite ? dit Rousseau.

— Et désormais inutile sera notre science auprès de ce malade ; de l’air, de l’exercice modéré… les bois… À propos… j’oubliais…

— Quoi donc ?

— Je pousse dimanche prochain une reconnaissance de botaniste dans le bois de Marly, êtes-vous homme à m’accompagner, mon très illustre confrère ?

— Oh ! repartit Rousseau, dites votre admirateur indigne.