Page:Dumas - Joseph Balsamo, Lévy frères, 1872, volume 3.djvu/254

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notre côté, mais sans partage du résultat ? Il en est encore temps. Vous n’êtes pas compromis, et vous pouvez vous retirer encore de l’association.

— Vous me méconnaissez, comtesse, dit le duc en lui baisant la main. M’avez-vous vu hésiter, le jour de votre présentation, quand il s’est agi de vous trouver une robe, un coiffeur, une voiture ? Eh bien ! je n’hésiterai pas davantage aujourd’hui. Oh ! je suis plus brave que vous ne croyez, comtesse.

— Alors, c’est convenu. Nous irons tous deux à la chasse, et ce me sera un prétexte pour ne voir personne, n’écouter personne et ne parler à personne.

— Pas même au roi ?

— Au contraire, je veux lui dire des mignardises qui le désespéreront.

— Bravo ! c’est de bonne guerre.

— Mais vous, Jean, que faites-vous ? voyons, sortez un peu de vos coussins ; vous vous enterrez tout vif, mon ami.

— Ce que je fais ? vous voulez le savoir ?

— Mais oui, cela nous servira peut-être à quelque chose.

— Eh bien, je pense…

— À quoi ?

— Je pense qu’à cette heure-ci tous les chansonniers de la ville et du département nous travaillent sur tous les airs possibles ; que les Nouvelles à la main nous déchiquettent comme chair à pâté ; que le Gazetier cuirassé nous vise au défaut de la cuirasse ; que le Journal des observateurs nous observe jusque dans la moelle des os ; qu’enfin nous allons être demain dans un état à faire pitié, même à un Choiseul.

— Et vous concluez ?… demanda le duc.

— Je conclus que je vais courir à Paris pour acheter un peu de charpie et pas mal d’onguent, pour mettre sur toutes nos blessures. Donnez-moi de l’argent, petite sœur.

— Combien ? demanda la comtesse.

— La moindre chose, deux ou trois cents louis.

— Vous voyez, duc, dit la comtesse en se tournant vers Richelieu, voilà déjà que je paie les frais de la guerre.