Page:Dumas - Joseph Balsamo, Lévy frères, 1872, volume 3.djvu/81

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sépara la colonne vertébrale à deux pouces du cervelet à peu près, et ouvrit une large plaie sanglante.

L’animal ou plutôt le cadavre de l’animal resta immobile.

— Oui, ma foi, il était bien mort, dit Althotas ; pas une fibre ne tressaille, pas un muscle ne frémit, pas un atome de chair ne s’insurge contre ce nouvel attentat. N’est-ce pas, il est mort, et bien mort ?

— Je le reconnais autant de fois que vous désirerez que je le reconnaisse, dit Balsamo impatient.

— Et voilà un animal inerte, glacé, à jamais immobile. Rien ne prévaut contre la mort, as-tu dit. Nul n’a la puissance de rendre la vie et même l’apparence de la vie à la pauvre bête.

— Nul, si ce n’est Dieu.

— Oui, mais Dieu ne sera pas assez inconséquent pour le faire. Quand Dieu tue, comme il est la suprême sagesse, c’est qu’il a une raison ou un bénéfice à tuer. Un assassin, je ne sais plus comment on l’appelle, un assassin disait cela, et c’était fort bien dit. La nature a un intérêt dans la mort.

« Ainsi voilà un chien aussi mort que possible, et la nature a pris son intérêt sur lui.

Althotas attacha son œil perçant sur Balsamo. Celui-ci, fatigué d’avoir soutenu si longtemps le radotage du vieillard, inclina la tête pour toute réponse.

— Eh bien, que dirais-tu, continua Althotas, si ce chien ouvrait l’œil et te regardait ?

— Cela m’étonnerait beaucoup, maître, répondit Balsamo en souriant.

— Cela t’étonnerait ? Ah ! c’est bien heureux !

En achevant ses paroles avec son rire faux et lugubre, le vieillard attira près du chien un appareil composé de pièces de métal séparées par des tampons de drap. Le drap de cet appareil trempait dans un mélange d’eau acidulée ; les deux extrémités ou les deux pôles, comme on les appelle, sortaient du baquet.

— Quel œil veux-tu qu’il ouvre, Acharat ? demanda le vieillard.