Page:Dumas - Joseph Balsamo, Lévy frères, 1872, volume 3.djvu/88

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— Ah ! chère comtesse, vous me poussez dans des traquenards. Vous savez que j’ai la vue basse. Une masse me frappe, au diable les détails. Chez madame la dauphine, j’ai vu des os, voilà tout.

— Et chez mademoiselle de Taverney vous avez vu des masses, comme vous dites ; car madame la dauphine est une beauté distinguée, et mademoiselle de Taverney est une beauté vulgaire.

— Allons donc ! dit le roi ; à ce compte, Jeanne, vous ne seriez donc pas une beauté distinguée ? Vous vous moquez, je crois.

— Bon ! un compliment, dit tout bas la comtesse ; malheureusement, ce compliment sert d’enveloppe à un autre compliment qui n’est point pour moi.

Puis, tout haut :

— Ma foi, dit-elle, je serais bien contente que madame la dauphine se choisît des dames d’honneur un peu ragoûtantes ; c’est affreux une cour de vieilles femmes.

— À qui le dites-vous, chère amie ? Je le répétais encore hier au dauphin ; mais la chose lui est indifférente, à ce mari-là.

— Et pour commencer, tenez, si elle prenait cette demoiselle de Taverney ?

— Mais on la prend, je crois, répondit Louis XV.

— Ah ! vous savez cela, sire ?

— Je crois l’avoir entendu dire, du moins.

— C’est une fille sans fortune.

— Oui, mais elle est née. Ces Taverney-Maisou-Rouge sont de bonne maison et d’anciens serviteurs.

— Qui les pousse ?

— Je n’en sais rien. Mais je les crois gueux, comme vous dites.

— Alors ce n’est pas M. de Choiseul, car ils crèveraient de pensions.

— Comtesse, comtesse, ne parlons pas politique, je vous en supplie.

— C’est donc parler politique de dire que les Choiseul vous ruinent.