Page:Dumas - Joseph Balsamo, Lévy frères, 1872, volume 3.djvu/90

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— Mais vous êtes féroce aujourd’hui, Jeanne, dit Chon.

— J’en ai le droit, n’est-ce pas ?

— Oh ! à merveille. Mais je vous laisse, ma chère.

— Pourquoi cela ?

— J’ai peur que vous ne me dévoriez.

Trois coups retentirent à la porte du boudoir.

— Bon ! qui frappe maintenant ? dit la comtesse avec impatience.

— Celui-là va être bien reçu ! murmura Chon.

— Il vaudrait mieux que je fusse mal reçu, moi, dit Jean en poussant la porte avec une ampleur toute royale.

— Eh bien, qu’arriverait-il si vous étiez mal reçu, car enfin ce serait possible ?

— Il arriverait, dit Jean, que je ne reviendrais plus.

— Après ?

— Et que vous auriez plus perdu que moi à me mal recevoir.

— Impertinent !

— Bon ! voilà que l’on est impertinent parce qu’on n’est pas flatteur. Qu’a-t-elle donc ce matin, grande Chon ?

— Ne m’en parle pas, Jean, elle est inabordable. Ah ! voilà le chocolat.

—Eh bien, ne l’abordons pas. Bonjour, mon chocolat, dit Jean en prenant le plateau ; comment te portes-tu, mon chocolat ?

Et il alla poser le plateau dans un coin sur une petite table devant laquelle il s’assit.

— Viens, Chon, dit-il, viens ; ceux qui sont trop fiers n’en auront pas.

— Ah ! vous êtes charmants vous autres, dit la comtesse, voyant Chon faire signe de la tête à Jean qu’il pouvait déjeuner tout seul ; vous faites les susceptibles et vous ne voyez pas que je souffre.

— Qu’as-tu donc ? demanda Chon en se rapprochant.

— Non, s’écria la comtesse, mais c’est qu’il n’y en a pas un d’eux qui songe à ce qui m’occupe.

— Et quelle chose vous occupe donc ? Dites.