Page:Dumas - Joseph Balsamo, Lévy frères, 1872, volume 4.djvu/153

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d’un corps inerte, d’une statue qui est de chair au lieu d’être de pierre, de marbre ou de granit ?

— En effet, il n’y a rien, n’est-ce pas, dans un cadavre ?

— Rien, absolument rien.

— Vous le croyez ?

— J’en suis sûr.

— Mais dans un corps vivant ?

— Il y a le mouvement, dit superbement Marat.

— Et l’âme, vous n’en parlez pas, monsieur.

— Je ne l’ai jamais vue dans les corps que j’ai fouillés avec mon scalpel.

— Parce que vous n’avez fouillé que des cadavres.

— Oh ! si fait, monsieur, j’ai fort opéré sur les corps vivants.

— Et vous n’avez rien trouvé en eux de plus que dans les cadavres ?

— Si fait, j’ai trouvé la douleur ; est-ce la douleur que vous appelez l’âme ?

— Alors, vous n’y croyez pas ?

— À quoi ?

— À l’âme.

— J’y crois, parce que je suis libre de l’appeler le mouvement, si je veux.

— Voilà qui est fort bien ; vous croyez à l’âme, c’est tout ce que je vous demandais ; cela me fait du bien que vous y croyiez.

— Un instant, mon maître, entendons-nous, et surtout n’exagérons pas, dit Marat avec son sourire de vipère. Nous autres praticiens, nous sommes un peu matérialistes.

— Ces corps sont bien froids, dit Balsamo rêveur, et cette femme était bien belle.

— Mais oui.

— Une belle âme eût certes bien été à ce beau corps.

— Ah ! voilà où fut l’erreur de celui qui la créa. Beau fourreau, vilaine lame. Ce corps, maître, était celui d’une coquine qui sortait de Saint-Lazare lorsqu’elle mourut d’une inflammation cérébrale à l’Hôtel-Dieu. Sa chronique est longue