Page:Dumas - Joseph Balsamo, Lévy frères, 1872, volume 4.djvu/162

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À mon sel couvert d’écume.
À mon lac couleur du ciel,
À mon four, tourbe qui fume ;
À mon sarrasin de miel ;

À ma femme, à mon vieux père,
À mes enfants bien aimés ;
À la tombe où dort ma mère,
Sous les genêts parfumés ;

Salut ! la journée est faite,
Et me voici de retour :
Après le labeur, la fête,
Après l’absence, l’amour.


La jambe tomba sur le lit, que le malade chantait encore.


CVI

L’AME ET LE CORPS.


Chacun regardait le patient avec étonnement, le médecin avec admiration.

Il en fut qui dirent que tous deux étaient fous.

Marat traduisit cette opinion à l’oreille de Balsamo.

— La terreur a fait perdre l’esprit au pauvre diable, dit-il ; voilà pourquoi il ne souffre plus.

— Je ne crois pas, dit Balsamo, et, bien loin qu’il ait perdu l’esprit, je suis sûr, si je l’interrogeais, qu’il nous dirait, s’il doit mourir, le jour de sa mort ; s’il doit vivre, le temps que durera sa convalescence.

Marat fut prêt de partager l’opinion générale, c’est-à-dire de croire Balsamo aussi fou que le patient.

Cependant le chirurgien liait activement les artères d’où s’échappaient des flots de sang.

Balsamo tira de sa poche un flacon, versa sur un tampon de charpie quelques gouttes de l’eau que ce flacon renfermait,