— Vous entendez, messieurs, dit Balsamo, il guérira.
— Demandez-lui en combien de jours, dit Marat.
— En combien de jours ?
— Oui, vous avez dit qu’il indiquerait lui-même les phases et le terme de sa convalescence.
— Je ne demande pas mieux que de l’interroger là-dessus.
— Interrogez-le donc, alors.
— Et, quand croyez-vous qu’Havard soit guéri ? demanda Balsamo.
— Oh ! la convalescence sera longue ; attendez ; un mois, six semaines, deux mois : il est entré ici il y a cinq jours, il en sortira deux mois et quinze jours après y être entré.
— Et il en sortira guéri ?
— Oui.
— Mais, dit Marat, incapable de travailler, et par conséquent de nourrir sa femme et ses enfants.
Havard joignit de nouveau les mains.
— Oh ! Dieu est bon, et Dieu y pourvoira.
— Et comment Dieu y pourvoira-t-il ? demanda Marat. Pendant que je suis en train d’apprendre aujourd’hui, je voudrais bien apprendre cela.
— Dieu a envoyé près de son lit un homme charitable qui l’a pris en pitié, et qui a dit tout bas : « Je veux que le pauvre Havard ne manque de rien. »
Tous les assistants se regardèrent ; Balsamo sourit.
— En vérité, nous assistons à un étrange spectacle, dit le chirurgien en chef, en même temps qu’il saisissait la main du malade, auscultait sa poitrine et palpait son front ; cet homme rêve.
— Vous croyez ? dit Balsamo.
Et lançant au blessé un regard plein d’autorité et d’énergie :
— Éveillez-vous, Havard ! lui dit-il
Le jeune homme ouvrit les yeux avec effort et regarda avec une profonde surprise tous les assistants, devenus pour lui inoffensifs de menaçants qu’ils étaient.
— Eh bien ! dit-il douloureusement, on ne m’a donc pas encore opéré ? On va donc encore me faire souffrir ?