la disparition de sa montre, s’était arrêté et avait demandé dame Grivette.
Un enfant de sept à huit ans, maigre, chétif et étiolé, lui avait répondu de sa voix criarde :
— Maman, elle est sortie ; elle a dit que, si monsieur rentrait, on lui donnât cette lettre.
— Non, mon petit ami, dit Marat, tu lui diras qu’elle me l’apporte elle-même.
— Bien, monsieur.
Marat et Balsamo avaient continué leur chemin.
— Ah ! dit Marat en indiquant une chaise à Balsamo, et en tombant lui-même sur un escabeau, je vois que le maître a de beaux secrets.
— C’est que je suis entré plus avant qu’un autre, peut-être, dans la confidence de la nature et de Dieu, répondit Balsamo.
— Oh ! s’écria Marat, comme la science prouve l’omnipotence de l’homme, et qu’on doit être fier d’être homme !
— C’est vrai, et médecin, devriez-vous ajouter.
— Aussi, je suis fier de vous, maître, dit Marat.
— Et, cependant, répliqua en souriant Balsamo, je ne suis qu’un pauvre médecin des âmes.
— Oh ! ne parlons pas de cela, monsieur, vous qui avez arrêté le sang du blessé par des moyens matériels.
— Je croyais que ma plus belle cure était de l’avoir empêché de souffrir ; il est vrai que vous m’avez assuré qu’il était fou.
— Il l’a été un moment, certes.
— Qu’appelez-vous folie ? N’est-ce point une abstraction de l’âme ?
— Ou de l’esprit, dit Marat.
— Nous ne discuterons pas là-dessus ; l’âme me sert à nommer le mot que je cherche. Du moment où la chose est trouvée, peu m’importe comment vous l’appelez.
— Ah ! voilà où nous différons d’opinion, monsieur ; vous prétendez avoir trouvé la chose et ne plus chercher que le mot ; moi, je soutiens que vous cherchez tout ensemble le mot et la chose.