Page:Dumas - Joseph Balsamo, Lévy frères, 1872, volume 4.djvu/187

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

tête si bien posée, la blancheur de l’ivoire à ses mains irréprochables.

Cet examen satisfit Rousseau, qui admirait le beau en véritable artiste, partout où il le rencontrait.

— Monsieur, dit-il, qu’y a-t-il pour votre service ?

— On a dû vous dire, monsieur, répartit le gentilhomme, que je suis le comte de Coigny. J’y ajouterai que je viens à vous de la part de madame la dauphine.

Rousseau salua, tout rouge ; Thérèse, dans un angle de la salle à manger, les mains dans ses poches, contemplait avec des yeux complaisants le beau messager de la plus grande princesse de France.

— Son Altesse Royale me réclame… pourquoi ? dit Rousseau. Mais, prenez donc un siège, monsieur, s’il vous plaît.

Et Rousseau s’assit lui-même. Monsieur de Coigny prit une chaise de paille et l’imita.

— Monsieur, voici le fait : Sa Majesté, l’autre jour, en dînant à Trianon, a manifesté quelque sympathie pour votre musique, qui est charmante. Sa Majesté chantait vos meilleurs airs. Madame la dauphine, qui cherche en toute chose à plaire à Sa Majesté, a pensé que ce serait pour le roi un plaisir de voir représenter un de vos opéras-comiques à Trianon, sur le théâtre…

Rousseau salua profondément.

— Je viens donc, monsieur, vous demander, de la part de madame la dauphine…

— Oh ! monsieur, interrompit Rousseau, ma permission n’a rien à faire là. Mes pièces et les ariettes qui en font partie appartiennent au théâtre qui les a représentées. C’est aux comédiens qu’il faut les demander, et là Son Altesse Royale ne rencontrera pas plus d’obstacles que chez moi. Les comédiens seront très heureux de jouer et de chanter devant Sa Majesté et toute la cour.

— Ce n’est pas précisément cela que je suis chargé de vous demander, monsieur, dit M. de Coigny ; Son Altesse Royale madame la dauphine veut donner au roi un divertissement plus complet et plus rare. Elle sait tous vos opéras, monsieur…