Page:Dumas - Joseph Balsamo, Lévy frères, 1872, volume 4.djvu/214

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brûlé tour à tour dans l’attente. Enfin, le duc revint et mit un doigt sur ses lèvres.

Taverney pâlit de joie et vint à la rencontre de son ami, qui l’entraîna sous la loge royale.

Là, ils entendirent ce que peu de gens pouvaient entendre.

Madame du Barry disant au roi :

— Attendrai-je Votre Majesté à souper ce soir ?

Et le roi répondant :

— Je me sens fatigué, comtesse ; excusez-moi.

Au même instant le dauphin arrivait, et, marchant presque sur les pieds de la comtesse sans paraître la voir :

— Sire, dit-il, Votre Majesté nous fera-t-elle l’honneur de souper à Trianon ?

— Non, mon fils ; je le disais à l’instant même à madame ; je me sens fatigué ; toute votre jeunesse m’étourdirait… Je souperai seul.

Le dauphin s’inclina et partit. Madame du Barry salua jusqu’à la ceinture et se retira, tremblante de colère. Le roi fit alors un signe à Richelieu.

— Duc, dit-il, j’ai à vous parler de certaine affaire qui vous regarde.

— Sire…

— Je n’ai pas été content… Je veux que vous m’expliquiez… Tenez… je soupe seul, vous me tiendrez compagnie.

Et le roi regardait Taverney.

— Vous connaissez, je crois, ce gentilhomme, duc ?

— M. de Taverney ? Oui, sire.

— Ah ! le père de la charmante chanteuse ?

— Oui, sire.

— Écoutez-moi, duc.

Le roi se baissa pour parler à l’oreille de Richelieu. Taverney s’enfonça les ongles dans la peau, pour ne pas donner signe d’émotion.

Un moment après, Richelieu passa devant Taverney, et lui dit :

— Suis-moi sans affectation.

— Où cela ? dit Taverney de même.