Page:Dumas - Joseph Balsamo, Lévy frères, 1872, volume 4.djvu/22

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L’un aurait aimé, disait-il, voir son gouvernement plus rapproché de Versailles. Il se plaisait à causer de cela avec un homme d’un crédit aussi grand que celui de M. de Richelieu.

Un autre prétendait avoir été oublié trois fois par M. de Choiseul, dans des promotions de chevaliers de l’ordre ; il comptait sur l’obligeante mémoire de M. de Richelieu pour rafraîchir celle du roi, à présent que rien ne faisait plus obstacle au bon vouloir de Sa Majesté.

Enfin cent demandes plus ou moins avides, mais toutes enveloppées avec un art extrême, se produisirent aux oreilles charmées du maréchal.

Peu à peu la foule s’éloigna ; on voulait, disait-on, laisser M. le maréchal à ses importantes occupations.

Un seul homme demeura dans le salon.

Il ne s’était pas approché avec les autres, il n’avait rien demandé, il ne s’était pas présenté même.

Quand les rangs furent éclaircis, cet homme vint au duc avec un sourire sur les lèvres.

— Ah ! monsieur de Taverney, fit le maréchal ; enchanté, enchanté !

— Je t’attendais, duc, pour te faire mon compliment, et un compliment positif, un compliment sincère.

— Ah ! vraiment ! et de quoi donc ? répliqua Richelieu que la réserve de ses visiteurs avait mis lui-même dans la nécessité d’être discret, et comme mystérieux.

— Mais, mon compliment de ta nouvelle dignité, duc.

— Chut ! chut ! fit le maréchal ; ne parlons pas de cela… Rien n’est fait, c’est un on-dit.

— Cependant, mon cher maréchal, bien des gens sont de mon avis, car tes salons étaient pleins.

— Je ne sais vraiment pourquoi.

— Oh ! je le sais bien, moi.

— Quoi donc, quoi donc ?

— Un seul mot de moi.

— Lequel ?

— Hier, à Trianon, j’eus l’honneur de faire ma cour au roi.