Page:Dumas - Joseph Balsamo, Lévy frères, 1872, volume 4.djvu/254

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longtemps auparavant, se présentera aujourd’hui chez vous pour obtenir une consultation nouvelle. Vos nombreuses occupations vous permettront-elles de donner à cette personne une demi-heure entre quatre et cinq heures du soir ? »

Cette lecture achevée pour la deuxième ou troisième fois, Balsamo retombait dans sa recherche.

— Ce n’est pas la peine de consulter Lorenza pour si peu ; d’ailleurs, ne sais-je plus deviner moi-même ? L’écriture est longue, signe d’aristocratie ; irrégulière et tremblée, signe de vieillesse ; pleine de fautes d’orthographe, c’est d’un courtisan. Ah ! niais que je suis ! c’est de M. le duc de Richelieu. Bien certainement j’aurai une demi-heure pour vous, monsieur le duc ; une heure, une journée. Prenez mon temps et faites-en le vôtre. N’êtes-vous pas, sans le savoir, un de mes agents mystérieux, un de mes démons familiers ? Ne poursuivons-nous pas la même œuvre ? n’ébranlons-nous pas la monarchie d’un même effort, vous, en vous faisant son âme, moi, en me faisant son ennemi. Venez, monsieur le duc, venez.

Et Balsamo tira sa montre pour voir combien de temps encore il avait à attendre le duc.

En ce moment une sonnette retentit dans la corniche du plafond.

— Qu’y a-t-il donc ? fit Balsamo tressaillant ; Lorenza m’appelle, Lorenza ! Elle veut me voir. Lui serait-il arrivé quelque chose de fâcheux ? ou bien serait-ce un de ces retours de caractère dont j’ai été si souvent témoin et quelquefois victime ? Hier, elle était bien pensive, bien résignée, bien douce ; hier, elle était bien comme j’aime à la voir. Pauvre enfant ! Allons.

Alors il ferma sa chemise brodée, cacha son jabot de dentelle sous sa robe de chambre, donna un regard à son miroir pour s’assurer que sa coiffure n’était pas trop en désordre, et s’achemina vers l’escalier, après avoir répondu par un coup de sonnette pareil à la demande de Lorenza.

Mais, selon son habitude, Balsamo s’arrêta dans la chambre qui précédait celle de la jeune femme, et, se tournant les bras croisés du côté où il supposait qu’elle devait être, avec