Page:Dumas - Joseph Balsamo, Lévy frères, 1872, volume 4.djvu/82

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M. d’Aiguillon ; que, d’ailleurs, il ne devait pas coucher à Paris, ainsi qu’il avait été convenu d’abord ; que, sans doute, il ne reviendrait pas seul de la campagne, et traverserait seulement Paris en prenant les nouvelles à son hôtel ; que, par conséquent, M. d’Aiguillon ferait bien de retourner chez lui-même, où le maréchal monterait en passant.

— Écoutez, Rafté, dit d’Aiguillon qui s’était fort assombri durant cette réplique toute obscure, vous êtes la conscience de mon oncle : répondez-moi en honnête homme. On me joue, n’est-ce pas, et M. le maréchal ne veut pas me voir. Ne m’interrompez pas, Rafté, vous avez été pour moi souvent un bon conseil, et j’ai pu être pour vous, ce que je serai encore, un bon ami ; faut-il que je retourne à Versailles ?

— Monsieur le duc, sur l’honneur, vous recevrez chez vous, avant une heure d’ici, la visite de M. le maréchal.

— Mais alors, autant que je l’attende ici, puisqu’il y viendra.

— J’ai eu l’honneur de vous dire qu’il n’y viendrait peut-être pas seul.

— Je comprends… et j’ai votre parole, Rafté.

À ces mots, le duc sortit tout rêveur, mais d’un air aussi noble et aussi gracieux que l’était peu la figure du maréchal lorsqu’il sortit d’un cabinet vitré, après le départ de son neveu.

Le maréchal souriait comme un de ces laids démons que Callot a semés dans ses Tentations.

— Il ne se doute de rien, Rafté ? dit-il.

— De rien, monsieur.

— Quelle heure est-il ?

— L’heure ne fait rien à la chose, monseigneur ; il faut attendre que notre petit procureur du Châtelet soit venu m’avertir. Les commissaires sont encore chez l’imprimeur.

Rafté n’avait point achevé quand un valet de pied fit entrer par une porte secrète un personnage assez crasseux, assez laid, assez noir, une de ces plumes vivantes pour lesquelles M. du Barry professait une si violente antipathie.