Page:Dumas - Joseph Balsamo, Lévy frères, 1872, volume 5.djvu/141

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

— Et pourquoi, continua-t-elle, vous voit-on ainsi tout à coup sans nouvelles de vous ?

— Mais, répondez-moi, chère Andrée, pourquoi vous-même avez-vous cessé de m’écrire ?

— Oui, c’est vrai ; mais depuis quelques jours seulement.

— Depuis près de quinze jours, Andrée.

Andrée baissa la tête.

— Négligente ! dit Philippe avec un doux reproche.

— Non, mais souffrante, Philippe. Tenez, vous avez raison, mon malaise remonte au jour où vous avez cessé de recevoir des nouvelles de moi : depuis ce jour, les choses les plus chères m’ont été une fatigue, un dégoût.

— Enfin, je suis fort content, au milieu de tout cela, du mot que vous avez dit tout à l’heure.

— Quel mot ai-je dit ?

— Vous avez dit que vous étiez bien heureuse ; tant mieux, car si l’on vous aime ici, et si l’on y pense à vous, il n’en est pas de même pour moi.

— Pour vous ?

— Oui, pour moi qui étais complétement oublié là-bas ; même par ma sœur.

— Oh ! Philippe !

— Croiriez-vous, ma chère Andrée, que depuis mon départ, que l’on m’avait dit si pressé, je n’ai eu aucune nouvelle de ce prétendu régiment dont on m’envoyait prendre possession, et que le roi m’avait fait promettre par M. de Richelieu, par mon père même.

— Oh ! cela ne m’étonne pas, dit Andrée.

— Comment, cela ne vous étonne pas ?

— Non. Si vous saviez, Philippe, M. de Richelieu et mon père sont tout bouleversés, ils semblent deux corps sans âme. Je ne comprends rien à la vie de tous ces gens-là. Le matin, mon père s’en va courir après son vieil ami, comme il l’appelle ; il le pousse à Versailles, chez le roi ; puis, il revient l’attendre ici, où il passe son temps à me faire des questions que je ne comprends pas. La journée se passe ; pas de nouvelles. Alors M. de Taverney entre dans ses grandes colères. Le duc le