Page:Dumas - La Femme au collier de velours, 1861.djvu/118

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— Lis, dit le Parisien en lui montrant son passeport : lis, jeune homme : « Voyageant pour la politique et pour l’art. » C’est écrit !

— Ô République ! murmura Hoffmann.

— Avoue donc, jeune ami de la liberté, lui dit son protecteur.

— Ce serait me vanter d’une idée que je n’ai pas eue, répliqua Hoffmann. Je n’aime pas la fausse gloire ; non, la caisse que j’ai prise à Strasbourg, et qui m’arrivera par le roulage, ne contient qu’un violon, une boîte à couleurs et quelques toiles roulées.

Ces mots diminuèrent beaucoup l’estime que certains avaient conçue d’Hoffmann. On lui rendit ses papiers, on fit raison à ses rasades, mais on cessa de le regarder comme un sauveur des peuples esclaves.

L’un des patriotes ajouta même :

— Il ressemble à Saint-Just, mais j’aime mieux Saint-Just.

Hoffmann replongé dans sa rêverie, qu’échauffaient le poêle, le tabac et le vin de Bourgogne, demeura quelque temps silencieux. Mais soudain relevant la tête :

— On guillotine donc beaucoup ici ? dit-il.

— Pas mal, pas mal ; cela a baissé un peu depuis les Brissotins, mais c’est encore satisfaisant.

— Savez-vous où je trouverais un bon gîte, mes amis ?

— Partout.

— Mais pour tout voir.

— Ah ! alors loge-toi du côté du quai aux Fleurs.

— Bien.

— Sais-tu où cela se trouve, le quai aux Fleurs ?