Page:Dumas - La Femme au collier de velours, 1861.djvu/180

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Le salon était grec comme l’antichambre, tendu avec du drap de Sedan à soixante-dix francs l’aune ; le tapis seul coûtait six mille livres ; le docteur fit remarquer ce tapis à Hoffmann ; il représentait la bataille d’Arbelles copiée sur la fameuse mosaïque de Pompéïa.

Hoffmann, ébloui de ce luxe inouï, ne comprenait pas que l’on fît de pareils tapis pour marcher dessus.

Du salon, on passa dans le boudoir ; le boudoir était tendu de cachemire. Au fond, dans un encadrement, était un lit bas faisant canapé, pareil à celui sur lequel monsieur Guérin coucha depuis Didon écoutant les aventures d’Énéas. C’était là qu’Arsène avait donné l’ordre de faire attendre.

— Maintenant, jeune homme, dit le docteur, vous voilà introduit, c’est à vous de vous conduire d’une façon convenable. Il va sans dire que si l’amant en titre vous surprenait ici, vous seriez un homme perdu.

— Oh ! s’écria Hoffmann, que je la revoie, que je la revoie seulement, et…

La parole s’éteignit sur les lèvres d’Hoffmann ; il resta les yeux fixés, les bras étendus, la poitrine haletante.

Une porte cachée dans la boiserie venait de s’ouvrir, et, derrière une glace tournante, apparaissait Arsène, véritable divinité du temple dans lequel elle daignait se faire visible à son adorateur.

C’était le costume d’Aspasie dans tout son luxe antique, avec ses perles dans les cheveux, son manteau de pourpre brodé d’or, sa longue robe blanche maintenue à la taille par une simple ceinture de perles, des bagues aux pieds et aux mains, et, au milieu de tout cela, cet étrange orne-