Page:Dumas - La Femme au collier de velours, 1861.djvu/228

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bord, puis, peu à peu élargissant le rond qu’elle traçait, elle se rapprocha d’Hoffmann. Hoffmann, haletant, la sentait venir, la sentait se rapprocher ; il comprenait qu’au dernier cercle elle allait le toucher, et qu’alors force lui serait de se lever à son tour, et de prendre part à cette valse brûlante. C’était à la fois chez lui du désir et de l’effroi. Enfin Arsène, en passant, étendit la main, et du bout des doigts l’effleura. Hoffmann poussa un cri, bondit comme si l’étincelle électrique l’eût touché, s’élança sur la trace de la danseuse, la joignit, l’enlaça dans ses bras, continuant dans sa pensée l’air interrompu en réalité, pressant contre son cœur ce corps qui avait repris son élasticité, aspirant les regards de ses yeux, le souffle de sa bouche, dévorant de ses aspirations à lui ce cou, ces épaules, ces bras ; tournant non plus dans un air respirable, mais dans une atmosphère de flamme qui, pénétrant jusqu’au fond de la poitrine des deux valseurs, finit par les jeter, haletans et dans l’évanouissement du délire, sur le lit qui les attendait.

Quand Hoffmann se réveilla le lendemain, un de ces jours blafards des hivers de Paris venait de se lever, et pénétrait jusqu’au lit par le rideau arraché de la fenêtre. Il regarda autour de lui, ignorant où il était, et sentit qu’une masse inerte pesait à son bras gauche. Il se pencha du côté où l’engourdissement gagnait son cœur, et reconnut, couchée près de lui, non plus la belle danseuse de l’Opéra, mais la pâle jeune fille de la place de la Révolution.

Alors il se rappela tout, tira de dessous ce corps raidi son bras glacé, et voyant que ce corps demeurait immo-