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Page:Dumas - La Femme au collier de velours, 1861.djvu/59

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car ce père était conseiller criminel et commissaire de justice près le tribunal supérieur provincial. Autour de cette mère et de ce père, il y avait des oncles juges, des oncles baillis, des oncles bourgmestres, des tantes jeunes encore, belles encore, coquettes encore ; oncles et tantes, tous musiciens, tous artistes, tous pleins de sève, tous allègres. Hoffmann disait les avoir vus ; il se les rappelait exécutant autour de lui, enfant de six, de huit, de dix ans, des concerts étranges où chacun jouait d’un de ces vieux instrumens dont on ne sait même plus les noms aujourd’hui : tympanons, rebecs, cithares, cistres, violes d’amour, violes de gamba. Il est vrai que personne autre qu’Hoffmann n’avait jamais vu ces oncles musiciens, ces tantes musiciennes, et qu’oncles et tantes s’étaient retirés les uns après les autres comme des spectres, après avoir éteint, en se retirant, la lumière qui brûlait sur leurs pupitres.

De tous ces oncles, cependant, il en restait un. De toutes ces tantes, cependant, il en restait une.

Cette tante, c’était un des souvenirs charmans d’Hoffmann.

Dans la maison où Hoffmann avait passé sa jeunesse, vivait une sœur de sa mère, une jeune femme aux regards suaves et pénétrant au plus profond de l’âme ; une jeune femme douce, spirituelle, pleine de finesse, qui, dans l’enfant que chacun tenait pour un fou, pour un maniaque, pour un enragé, voyait un esprit éminent ; qui plaidait seule pour lui, avec sa mère, bien entendu ; qui lui prédisait le génie, la gloire ; prédiction qui plus d’une fois fit venir les larmes aux yeux de la mère d’Hoffmann ; car elle