Aller au contenu

Page:Dumas - La Princesse Flora (1871).djvu/22

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
18
la princesse flora

pas t’imaginer ce que je vis là. Je ne sais par où commencer, et, surtout, par où finir. C’était un nouveau monde, c’était un magnifique poëme. Le plancher était blanc et ciré comme une table ; les agrès, tant ils étaient coquets, semblaient des papillotes posées sur la tête d’une femme ; les haubans avaient l’air de dentelles fantastiques ; les cuivres étincelaient comme de l’or ; le bronze des canons était noir comme l’aile d’un corbeau ; et puis cette foule tout autour… et puis cette immensité devant les yeux, tout cela était enivrant !

Au signal donné par des trompettes d’argent, il sembla que notre géant tendait largement ses bras pour saisir le vent. Sa poitrine ondulait, et notre colosse, accélérant d’instant en instant sa marche, finit par s’élancer devant lui en dévorant l’espace. La tête me tournait, prise d’un séduisant vertige, et, quand mes yeux furent redevenus clairs, ils se rencontrèrent avec les yeux du capitaine de vaisseau, dont je n’avais pu voir la physionomie au moment où il était venu à notre rencontre. La nature, comme dit Shakespeare, aurait pu le montrer