Page:Dumas - La Tulipe noire (1892).djvu/173

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il faisait grand vent ce jour-là, et tout craquait dans la tourelle, — la porte s’ouvrit tout à coup, et Cornélius fut surpris sa cruche entre ses genoux.

Gryphus, voyant un objet inconnu, et par conséquent défendu, aux mains de son prisonnier, Gryphus fondit sur cet objet avec plus de rapidité que ne fait le faucon sur sa proie.

Le hasard, ou cette adresse fatale que le mauvais esprit accorde parfois aux êtres malfaisants, fit que sa grosse main calleuse se posa tout d’abord au beau milieu de la cruche, sur la portion de terreau dépositaire du précieux oignon, cette main brisée au-dessus du poignet et que Cornélius van Baerle lui avait si bien remise.

— Qu’avez-vous là ? s’écria-t-il. Ah ! je vous y prends !

Et il enfonça sa main dans la terre.

— Moi ? Rien, rien ! s’écria Cornélius tout tremblant.

— Ah ! je vous y prends ! Une cruche, de la terre ! il y a quelque secret coupable caché là-dessous !

— Cher monsieur Gryphus ! supplia van Baerle, inquiet comme la perdrix à qui le moissonneur vient de prendre sa couvée.

En effet, Gryphus commençait à creuser la terre avec ses doigts crochus.

— Monsieur, monsieur ! prenez garde ! dit Cornélius pâlissant.

— À quoi ? mordieu ! à quoi ? hurla le geôlier.

— Prenez garde ! vous dis-je ; vous allez le meurtrir !

Et d’un mouvement rapide, presque désespéré, il arracha des mains du geôlier la cruche, qu’il cacha comme un trésor sous le rempart de ses deux bras.

Mais Gryphus, entêté comme un vieillard, et de plus en