Page:Dumas - La Tulipe noire (1892).djvu/282

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aussi bien qu’eux, lecture lui ayant été faite du règlement au moment de son entrée en prison, et certains articles du règlement lui étaient parfaitement entrés dans la mémoire.

Ils lui racontaient en outre comment l’application de ce règlement avait été faite à l’endroit d’un prisonnier nommé Mathias, qui, en 1668, c’est-à-dire cinq ans auparavant, avait commis un acte de rébellion bien autrement anodin que celui que venait de se permettre Cornélius.

Il avait trouvé sa soupe trop chaude et l’avait jetée à la tête du chef des gardiens, qui, à la suite de cette ablution, avait eu le désagrément en s’essuyant le visage de s’enlever une partie de la peau.

Mathias, dans les douze heures, avait été extrait de sa chambre ;

Puis conduit à la geôle, où il avait été inscrit comme sortant de Loevestein ;

Puis mené à l’esplanade, dont la vue est fort belle et embrasse onze lieues d’étendue.

Là on lui avait lié les mains ;

Puis bandé les yeux, récité trois prières ;

Puis on l’avait invité à faire une génuflexion, et les gardes de Lœvestein, au nombre de douze, lui avaient, sur un signe fait par un sergent, logé fort habilement chacun une balle de mousquet dans le corps.

Ce dont Mathias était mort incontinent.

Cornélius écouta avec la plus grande attention ce récit désagréable.

Puis, l’ayant écouté :

— Ah ! ah ! dit-il dans les douze heures, dites-vous ?

— Oui, la douzième heure n’était pas même encore sonnée, à ce que je crois, dit le narrateur.