Page:Dumas - La Villa Palmieri.djvu/105

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quisses ; Guirlandajo les regarda les unes après les autres, puis, secouant la tête avec un mouvement où perçait quelque peu d’envie :

— Ce jeune homme, murmura-t-il en se retirant, sera un jour notre maître à tous.

Un autre jour, un peintre donne à Michel-Ange une tête à copier ; c’était une tête d’un des maîtres du siècle passé, on ne sait lequel, mais d’un maître enfin. L’enfant se met à l’œuvre, et rend au peintre, au lieu de l’original, la copie qu’il a eu le soin de noircir à la fumée. Le peintre ne voit aucune différence, et demande alors à voir la copie.

Michel-Ange éclate de rire ; en croyant faire un tour d’écolier, il avait fait un tour de maître.

Mais, comme nous l’avons dit, le jeune Michel-Ange est tout à la sculpture. Sur le conseil de Politien, il fait le Combat des Centaures, dont la vue, soixante-dix ans plus tard, devait lui faire regretter tout le temps qu’il avait perdu à la peinture ; il sculpte le grand crucifix de bois du San-Spirito ; il achève l’autel de Saint-Dominique, commencé par Jean de Pise ; il fait un Amour endormi, qu’il envoie à Rome et vend pour antique ; il exécute pour Giacomo Galli le Bacchus qui est à cette heure à la galerie de Florence ; puis, enfin, compose et taille, pour le cardinal de Saint-Denis, le fameux groupe de la Piété qui se trouve aujourd’hui dans la première chapelle à droite en entrant à Saint-Pierre.

Ici s’arrête la première période de sa vie d’artiste.

Pendant les dix ans qui viennent de s’écouler, Laurent le Magnifique est mort ; Pierre de Médicis, son fils, a été chassé ; les Français ont conquis Naples ; César Borgia s’est emparé de la Romagne, et Savonarole a été brûlé.

Michel-Ange a essayé du doux, du gracieux et du tendre. Il va passer au terrible.

La première œuvre de cette nouvelle période est le David de la place du Palais-Vieux : il la tire, comme nous l’avons dit, d’un bloc de marbre oublié depuis longtemps, ébauché par un autre, auquel personne ne songeait, qu’il relève, qu’il taille, qu’il anime ; la statue n’est pas un chef-d’œuvre, mais le tour de force n’en est pas moins grand.

Après la David, vient un bas-relief en bronze qu’il exécute