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Page:Dumas - La Villa Palmieri.djvu/108

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— Je te charge de faire mon portrait, lui dit Jules II en l’apercevant ; il s’agit de couler en bronze une statue colossale qui sera placée sur le portail de Sainte-Pétrone. Voilà mille ducats pour les premiers frais.

— Dans quel acte Votre Sainteté veut-elle être représentée ? demanda Michel-Ange.

— Donnant la bénédiction, dit le pape.

— Bien, voilà pour la main droite, dit Michel-Ange ; mais que mettrons-nous dans la main gauche ? Un livre ?

— Un livre ! un livre ! s’écria Jules II, est-ce que je m’entends aux lettres, moi ? Non, pas un livre, morbleu ! une épée.

Seize mois après, la statue était sur son piédestal. Jules II vint la voir.

— Dis donc, demanda-t-il en indiquant à l’artiste le mouvement du bras droit qui était un peu trop prononcé, donne-t-elle la bénédiction ou la malédiction, ta statue ?

— Toutes deux, répondit Michel-Ange ; elle pardonne le passé, elle menace l’avenir.

— Bravo ! dit Jules II ; j’aime qu’on me comprenne. Malgré la menace de la statue, elle fut renversée dans une émeute et mise en morceaux ; la tête seule pesait six cents livres, et elle avait coûté 5,000 ducats d’or.

Alphonse de Ferrare en acheta les débris, et en fit fondre une pièce de canon qu’il appela la Julia.

Jules II ramena Michel-Ange à Rome ; il lui promettait des travaux immenses ; Michel-Ange crut qu’il s’agissait de finir le tombeau et le suivit.

En son absence, Bramante avait fait venir Raphaël. Un jour Jules II appela Michel-Ange, qui depuis deux mois attendait ses ordres ; Michel-Ange accourut.

— Viens, lui dit le pape.

Il le conduisit à la chapelle Sixtine.

— il faut me couvrir cette chapelle de peintures ; voilà les travaux que je t’avais promis.

— Mais, s’écria Michel-Ange, je ne suis pas peintre, je suis sculpteur.

— Un homme comme toi est tout ce qu’il veut être, dit Jules II.