Page:Dumas - La Villa Palmieri.djvu/186

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un des plus nobles et des plus riches seigneurs de Florence.

L’aîné de ses fils avait quinze ans, et le cadet neuf, tous deux étaient élevés en jeunes seigneurs destinés aux armes : aussi, bien que sortant à peine de l’enfance, Hugo promettait-il de marcher dignement sur les traces de ses ancêtres ; il manœuvrait un cheval, maniait une épée, et lançait un faucon de manière à faire envie à plus d’un chevalier qui avait le double de son âge. Monter à cheval, courir les tournois, oiseler, comme on disait à cette époque, étaient ses seuls plaisirs ; et son père, messire Gualberti, le poussait fort à tous ces exercices, lui disant que, lorsqu’un chevalier savait ces trois choses et prier Dieu, il n’ignorait rien de ce qu’un noble homme doit savoir.

Or, il arriva qu’un jour Hugo projeta, avec plusieurs jeunes seigneurs de ses amis, une grande chasse au sanglier dans les Maremmes. La chasse au sanglier se faisait ordinairement en grande compagnie ; car, comme on le sait, elle n’est pas exempte de quelques dangers : le sanglier, forcé et tenant aux chiens, s’attaquait à l’épieu, et c’était alors une lutte corps à corps dans laquelle l’homme n’était pas toujours le vainqueur.

Le jeune Hugo se faisait une grande fête de cette chasse ; et lorsqu’il vint prendre congé de son père, il avait un certain air triomphant qui fit sourire le bon chevalier. Son père ne lui en fit pas moins la leçon sur la manière d’attaquer l’animal ou de l’attendre ; mais Hugo, qui avait déjà mis à mort une vingtaine de monstres de la même espèce, écouta les recommandations de son père en souriant ; et, comme il tenait son épée à la main, il fit avec cette arme deux ou trois évolutions qui prouvaient que le plus habile chasseur n’avait rien à lui apprendre sur ce sujet. Trois jours après, cette affreuse nouvelle arriva à messire Gualberti, que son fils, s’étant emporté à la poursuite d’un énorme sanglier, avait été tué par lui en le tuant lui-même, et retrouvé mort près du sanglier mort. Le désespoir de messire Gualberti fut profond. Ce fut néanmoins celui d’un homme craignant le Seigneur. Il leva les deux mains au ciel : Dieu me l’a donné, dit-il ; Dieu me l’a ôté... le saint nom du Seigneur soit béni. Puis il fit rapporter le corps qu’on avait