d’honneur de cet âge de fer, que presque toujours les sentimens religieux pliaient devant elles.
Cependant, à cette joie qu’avait éprouvée messire Gualberti avait presque immédiatement succédé une grande inquiétude : Lupo avait trente-huit ans, il était dans toute la force de l’âge ; Giovanni en avait seize : c’était encore un enfant. Aussi le lendemain du jour où s’était passée la scène que nous venons de raconter, le père vint-il trouver son fils dans la salle d’armes où il s’exerçait, et lui fit-il promettre de passer encore toute une année sans rien tenter contre Lupo. Giovanni se débattit un instant, mais, vaincu par les prières de son père, il promit ce que son père demandait.
L’année se passa donc, comme les précédentes, à entendre la messe mortuaire, à s’exercer aux armes, et à faire des courses dans les environs du château ; puis l’année écoulée, le jeune homme rappela à son père qu’il avait dix-sept ans. Mais le vieillard secoua la tête.
Il n’est pas encore temps, accorde-moi une autre année.
Le jeune homme résista plus violemment encore qu’il n’avait fait la première fois ; mais, comme la première fois, il céda enfin, et accorda à son père l’année que celui-ci demandait.
Cette année s’écoula comme les autres : la force de Giovanni s’était tellement accrue qu’elle était devenue proverbiale. Cependant cette force ne rassurait pas encore son père, aussi, quand l’année fut terminée, Giovanni demanda congé au vieillard pour aller combattre Lupo, il le vit : hésiter encore. Alors, devinant quel doute retenait son père, il tira le gantelet de fer qu’il portait ; posant sa main nue sur un bloc de macigno, c’est-à-dire sur un granit des plus durs que l’on connaisse, il appuya sans apparence d’effort, et la pierre, se creusant comme de la glaise, garda l’empreinte de sa main[1].
Se retournant aussitôt vers le vieillard : — Voyez, dit-il.
- ↑ Du temps de Franchie, qui a écrit la Vie de saint Jean Gualberti, on montrait encore cette pierre à l’abbaye de Montescalari.