a dit : Ce que vous délierez sur la terre sera délié dans le ciel.
— Je puis donc espérer que le ciel me pardonnera, mon père ? demanda Laurent.
— Oui, le ciel te pardonnera, dit le moine ; oui, je me fais garant de sa miséricorde, dit le prophète ; mais à trois conditions, entends-tu bien, Laurent ?
— Et ces trois conditions, quelles sont-elles ? demanda le moribond.
— La première, c’est que tu feras profession de foi avant que de mourir.
— Oh ! cela bien volontiers, mon père, s’écria Laurent, et soyez témoin et garant que je meurs dans la foi catholique, apostolique et romaine.
— La seconde, continua Savonarole, c’est que tu rendras tout le bien que, dans les banques et dans tes usures, tu auras injustement gagné ou retenu. Laurent hésita quelques minutes ; puis, faisant un effort sur lui-même :
— Eh bien ! dit-il, il sera fait comme vous le désirez, mon père ; je n’aurai pas le temps de faire cette restitution moi-même, mais je donnerai l’ordre qu’elle soit faite après moi.
— La troisième, reprit l’enthousiaste, la troisième, c’est que tu rendras la liberté à Florence, et que tu remettras la république dans le même état d’indépendance où ton père l’a prise.
Il se fit une contraction terrible sur la figure du mourant ; puis enfin, surmontant toute crainte :
— Jamais, s’écria Laurent, jamais ! il en sera de mon âme ce que Dieu ordonnera, mais je ne détruirai pas d’un mot l’œuvre de trois générations ; les Médicis seront ducs de Florence.
— C’est bien, dit le prophète, je savais d’avance ce que tu me répondrais ; c’est bien, meurs damné, et que les choses résolues dans la sagesse du Seigneur s’accomplissent en la terre comme au ciel.
Et il sortit sans ajouter un mot à sa menace, et sans que de son côté Laurent fit un geste pour le rappeler.
Lorsque Politien et Pic de La Mirandole rentrèrent dans