Page:Dumas - La Villa Palmieri.djvu/242

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Tous les assistans se mirent à rire, et Zaionczek comme les autres.

— N’en veux-tu point ? dit le petit Homme-Rouge en fronçant le sourcil.

— Si fait, si fait, s’écria Zaionczek. Diable ! quelle susceptibilité! Et tu dis donc, mon cher prophète, que je ne dois pas quitter ce petit parchemin ?

— Pas un instant.

— Ni jour ni nuit ?

— Ni jour ni nuit.

— Et si par hasard je le quittais ?

— Il deviendrait sans force contre le péril dont il est chargé de te préserver.

— Merci, dit Zaionczek en tournant et en retournant le talisman entre ses mains. Et que te faut-il pour cela ?

— Crois, dit le petit Homme Rouge, et je serai récompensé.

Alors le prophète fit signe de la main qu’on lui ouvrit un passage ; les assistans s’écartèrent avec un sentiment de terreur superstitieuse dont ils ne furent pas les maîtres, et le suivirent des yeux jusqu’à ce qu’il eût disparu à l’angle d’une maison.

Aucun de ceux qui l’avaient vu ce jour-là ne le revit jamais, excepté Bonaparte.

Mais voilà ce qui arriva :

Le lendemain, tandis que Bonaparte dictait à Bourrienne quelques ordres que Croisier s’apprêtait à porter, le général en chef aperçut par les fenêtres ouvertes une petite troupe d’Arabes qui venait insolemment assister le quartier-général. C’était la deuxième fois que les mameluks se permettaient pareille facétie ; cela impatienta le général en chef.

— Croisier, dit-il sans s’interrompre de ce qu’il faisait, prenez quelques guides et chassez-moi cette canaille-là. Aussitôt Croisier sortit, prit quinze guides et s’élança à la poursuite des Arabes.

En entendant le galop des chevaux qui partaient, Bonaparte s’interrompit, et allant à la fenêtre pour examiner ce qui allait se passer ;