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Page:Dumas - La Villa Palmieri.djvu/245

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Mais, au moment où il étendait le bras vers Croisier, le jeune homme chancela et tomba en arrière en disant :

— Enfin !

On le ramassa ; il avait la jambe cassée.

— Alors ce sera plus long encore que je ne le croyais, dit-il lorsqu’on le transporta au camp.

Bonaparte lui envoya son propre chirurgien. Celui-ci ne jugea point l’amputation nécessaire, et l’on eut l’espoir non-seulement de sauver la vie du jeune homme, mais encore de lui sauver la jambe.

Lorsqu’on leva le siège, Bonaparte donna les ordres les plus précis pour que rien ne manquât au blessé. On le plaça sur un brancard, et seize hommes, en se relayant par huit, le portaient alternativement.

Mais, entre Gazah et El-Arych, Croisier mourut du tétanos.

Ainsi s’accomplit la première prédiction du petit Homme Rouge.

Passons à Desaix.

Desaix, après avoir fait des merveilles aux Pyramides ; Desaix, après avoir reçu des Arabes eux-mêmes le titre de sultan Juste, quitta l’Égypte et passa en Europe, où Bonaparte l’avait précédé.

L’homme du destin suivait le cours de la fortune prédite : il avait fait le 48 brumaire ; il était premier consul, il rêvait le trône.

Une grande bataille pouvait le lui donner ; Bonaparte avait décidé que cette autre Pharsale aurait lieu dans les plaines de Marengo.

Desaix avait rejoint le premier consul à la Stradella : Bonaparte l’avait reçu les bras ouverts et lui avait confié une division en lui commandant de marcher sur San-Giuliano.

Le 14 juin, à cinq heures du matin, le canon autrichien réveille Bonaparte et l’attire sur le champ de bataille de Marengo, qu’il doit perdre et regagner dans la même journée.

On connaît les détails de cette étrange bataille, perdue à trois heures, gagnée à cinq.