Page:Dumas - La Villa Palmieri.djvu/250

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Chaque coup de marteau devait retentir jusqu’au quartier général de Tchaplitz.

À minuit, Murat fit réveiller Zaionczek. Le roi de Naples et le général polonais causèrent dix minutes ensemble, puis Murat repartit au galop.

Napoléon attendait le jour dans une des maisons qui bordaient la rivière : il n’avait pas voulu se coucher. Murat entra chez lui et le trouva debout.

— Sire, lui dit-il, Votre Majesté a sans doute bien examiné la position de l’ennemi ?

— Oui, répondit l’empereur.

— Votre Majesté alors a reconnu qu’un passage sous le feu d’une division deux fois forte comme nous est impraticable ?

— À peu près.

— Et que décide Votre Majesté ?

— De passer.

— Nous y resterons jusqu’au dernier.

— C’est probable, mais nous n’avons pas le choix du chemin.

— Pour une armée, non ; mais pour cinq cents hommes, si.

— Que voulez-vous dire ?

— Que je viens de conférer avec Zaionczek.

— Après ?

— Eh bien ! Zaionczek répond de Votre Majesté, si Votre Majesté veut se fier à ses Polonais. Ils connaissent un gué praticable ; ils savent des chemins inconnus des Russes mêmes ; dans cinq jours, ils seront avec Votre Majesté à Wilna.

— Et l’armée ?

— Elle sera perdue, mais Votre Majesté sera sauvée.

— Ceci est une fuite et non pas une retraite, Murat. Je resterai avec l’armée qui est restée avec moi ; notre destinée sera commune. Je périrai avec elle ou elle se sauvera avec moi. Je vous pardonne cette proposition, Murat, c’est tout ce que je puis faire.