Page:Dumas - La Villa Palmieri.djvu/40

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deux partis avait sa musique ordinaire, au son de laquelle il en vint aux mains avec tant d’acharnement que, malgré les cuirasses dont étaient couverts les combattans, au bout d’une demi-heure, beaucoup d’entre eux étaient déjà grièvement blessés. La nouvelle de cet événement arriva au palais Pitti au milieu des plaisirs d’un autre genre que le grand-duc François offrait à ses hôtes. Il ordonna aussitôt qu’un corps de cavalerie partit au galop et séparât les deux armées ; il était temps, on ne se bornait plus aux pierres, et on commençait à tirer les épées : si bien que la cavalerie eut grand peine à accomplir l’ordre dont elle était chargée. De compte fait, il y eut, tant dans la troupe d’Averard de Médicis que dans celle d’Antonio Bardi, vingt-sept blessés, dont sept moururent des suites de leurs blessures. De plus, parmi les assistans, onze personnes furent tuées sur le coup ; mais de celles-ci on s’en inquiéta peu, attendu qu’elles étaient de la populace. Florence la républicaine avait, comme on le voit, fait, depuis cent ans, de rudes pas vers l’aristocratie.

Nous avons dit comment le grand-duc François et Bianca Capelle, morts de la même maladie, avaient laissé le trône au cardinal Ferdinand, lequel avait vite jeté aux orties sa robe rouge, et avait épousé la princesse Marie-Christine de Lorraine. Les nouveaux époux reçurent la bénédiction nuptiale de la main de l’archevêque de Pise, dans cette chapelle du palais Pitti qui depuis cinquante ans avait vu tant de mariages et tant de morts, tant de fêtes et tant de deuils.

Le soir du 11 mai 1589 vit les réjouissances conjugales du nouveau duc surpasser toutes les magnificences de ses prédécesseurs : c’était Buontalenti qui, tout fier encore des embrassemens du Tasse, avait été chargé de la direction de ces fêtes, et qui avait promis de se surpasser.

En effet, voici ce que les élus de cette grande soirée purent voir, à leur profond étonnement :

D’abord ils furent introduits dans cette fameuse cour, chef-d’œuvre de l’Ammanato, laquelle était, comme un cirque antique, couverte d’un vélarium de toile rouge, et entourée de gradins qui s’ouvraient à l’endroit qui donne sur le jardin, pour faire place à une grande forteresse gardée par des soldats turcs. Chacun prit place sur les gradins