Page:Dumas - La Villa Palmieri.djvu/42

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soleil. Puis, lorsque les spectateurs émerveillés eurent tout une demi-heure de ce miraculeux spectacle, le jardin commença à se resserrer, renfermant, à mesure qu’il se resserrait, ses bosquets, ses grottes, ses fontaines, ses châteaux et ses lacs, jusqu’à ce que, réduit à sa grandeur première, il sortit par la porte qui lui avait donné entrée.

Alors la joute recommença, et au bout d’une demi-heure fut interrompue de nouveau, mais cette fois par un magnifique feu d’artifice qui se fit tour par toutes les ouvertures de la forteresse turque, qui, attendant toujours qu’on l’assiégeât, annonçait aux spectateurs que les divertissemens de la nuit n’étaient pas encore terminés. En effet, la dernière fusée éteinte, les gradins s’ouvrirent et par des escaliers ménagés intérieurement, donnèrent passage à ceux qui les couvraient jusqu’aux salles basses du palais, où était servi un Souper pour trois mille personnes. Le souper terminé, vers minuit les convives furent invités à remonter sur leurs gradins.

Mais l’étonnement fut grand et général lorsqu’on vit que l’aspect de la cour était entièrement changé : en effet, à cette heure elle représentait une mer couverte de dix-huit galères, de diverses grandeurs, montées par une armée de chevaliers chrétiens qui s’étaient croisés pour conquérir la forteresse turque, à l’instar des héros que venait d’immortaliser Torquato Tasso dans sa Jérusalem délivrée.

Alors commença l’assaut avec toutes les ruses de l’attaque et toutes les ressources de la défense, l’une et l’autre éclairées par un feu d’artifice continuel et des salves non interrompues de canon. Enfin, après une demi-heure d’un combat terrible, dans lequel assiégeans et assiégés firent preuve du plus grand courage, la forteresse fut prise, et la garnison, menacée d’être passée au fil de l’épée, se recommanda à la merci des dames, qui demandèrent et obtinrent sa grâce.

Ces fêtes durèrent un mois à peu près. Pendant un mois deux mille personnes, l’une dans l’autre, furent nourries et logées au palais Pitti ; et l’on trouva sur les livres de dépense du grand-duc que pendant ce mois, on avait bu 9.000 tonneaux de vin, converti en pain 7286 sacs de blé, brûlé 778 cordes de bois, épuisé 86,500 boisseaux d’avoine, brûlé