Page:Dumas - La salle d'armes 1 Pauline, Dumont, 1838.djvu/139

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allait s’enivrer de votre triomphe. Votre bouche sourit, les premiers sons de votre voix, tremblans et incertains, se firent entendre ; mais bientôt les notes s’échappèrent pures et vibrantes ; vos yeux cessèrent de regarder la terre et se fixèrent vers le ciel. Cette foule qui vous entourait disparut, et je ne sais même si les applaudissemens arrivèrent jusqu’à vous, tant votre esprit semblait planer au-dessus d’elle ; c’était un air de Bellini, mélodieux et simple, et cependant plein de larmes, comme lui seul savait les faire. Je ne vous applaudis pas, je pleurai. On vous reconduisit à votre place au milieu des félicitations ; moi seul n’osai m’approcher de vous ; mais je me plaçai de manière à vous voir toujours. La soirée reprit son cours, la musique continua d’en faire les honneurs, secouant sur son auditoire enchanté ses ailes harmonieuses et changeantes ; mais je n’entendis plus rien : depuis que vous aviez quitté le piano, tous mes sens s’étaient concentrés