Page:Dumas - La salle d'armes 1 Pauline, Dumont, 1838.djvu/316

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éprouve dans les premiers momens d’un retour. Je ne sais ce qui se passait dans le cœur de Pauline ; mais je sais que, quant à moi, je n’avais jamais été si heureux.

Quant au sentiment qui nous unissait, il était pur comme la fraternité : je n’avais pas, depuis un an, redit à Pauline que je l’aimais, depuis un an Pauline ne m’avait point fait le moindre aveu, et cependant nous lisions dans le cœur l’un de l’autre comme dans un livre ouvert, et nous n’avions plus rien à nous apprendre. Désirais-je plus que je n’avais obtenu ?… je ne sais ; il y avait tant de charme dans ma position que j’aurais peut-être craint qu’un bonheur plus grand ne la précipitât vers quelque dénouement fatal et inconnu. Si je n’étais pas amant, j’étais plus qu’un ami, plus qu’un frère ; j’étais l’arbre auquel, pauvre lierre, elle s’abritait, j’étais le fleuve qui emportait sa barque à mon courant, j’étais le soleil d’où lui venait la lumière ; tout ce qui existait d’elle existait par moi, et probablement le jour n’était pas loin où ce qui existait par moi existerait aussi pour moi.