Page:Dumas - Le Capitaine Aréna.djvu/159

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c’est bien connu, ce sont tous des sorciers et des sorcières en Calabre.

— Oh ! capitaine, vous me raconterez l’histoire, n’est-ce pas ?

— Oh ! moi, je ne la sais pas bien, dit le capitaine ; et puis d’ailleurs je n’aime pas beaucoup à parler de toutes ces histoires-là où le diable joue un rôle, attendu que, comme vous le savez, il y a déjà eu dans ma famille une histoire de sorcière. Mais vous allez traverser la Calabre, Dieu veuille qu’il ne vous y arrive aucun accident ! et vous pourrez demander au premier venu l’histoire de maître, Térence : Dieu merci ! elle est connue, et on vous la racontera.

— Vous croyez ?

—Oh ! j’en suis sûr.

Je pris mon album, et j’écrivis dessus en grosses lettres :

« Ne pas oublier de me faire raconter l’histoire de maître Térence de Catanzaro, qui a fait gratis une paire de culottes au diable, à la condition que le diable emporterait sa femme. »

Et je revins à Agnolo.

La toile était levée, et, sur une musique plus étrange encore que la ritournelle dont la bizarrerie m’avait déjà frappé, Agnolo venait de commencer une danse de sa composition : car non-seulement Agnolo était exécutant, mais encore compositeur ; danse dont rien ne peut donner une idée, et qui aurait eu un miraculeux succès dans l’opéra de la Tentation, si on avait pu y transporter tout ensemble les musiciens, la musique et le danseur. Malheureusement, ne connaissant que le titre du ballet, et n’en ayant point encore entendu le programme, je ne pouvais comprendre que fort superficiellement l’action, qui me paraissait des plus intéressantes et des plus compliquées. Je voyais bien de temps en temps Agnolo faire le geste d’un homme qui tire son fil, qui passe ses culottes, et qui avale un verre de vin ; mais ces différens gestes ne me paraissaient constituer, si je puis le dire, que les épisodes du drame, dont le fond me demeurait toujours obscur. Quant à Agnolo, sa pantomime devenait de plus en plus vive et animée, et sa danse bouffonne et fantastique à la fois était pleine d’un caractère d’entraî-