Page:Dumas - Le Capitaine Aréna.djvu/206

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pas vers eux, que voulez-vous ? dites vite ; on me fusille dans trois quarts d’heure, et je n’ai pas de temps à perdre.

— Général, dit Pellegrino, nous venons vous demander si vous voulez mourir en chrétien ?

— Je mourrai en soldat, dit Murat. Allez.

Pellegrino se retira à cette première rebuffade ; mais don Antonio Masdea resta. C’était un beau vieillard à la figure respectable, à la démarche grave, aux manières simples. Murat eut d’abord un moment d’impatience en voyant qu’il ne suivait pas son compagnon ; mais, en remarquant l’air de profonde douleur empreinte dans toute sa physionomie, il se contint.

— Eh bien ! mon père, lui dit-il, ne m’avez-vous point entendu ?

— Vous ne m’avez pas reçu ainsi la première fois que je vous vis, sire ; il est vrai qu’à cette époque vous étiez roi, et que je venais vous demander une grâce.

— Au fait, dit Murat, votre figure ne m’est pas inconnue : où vous ai-je donc vu ? Aidez ma mémoire.

— Ici même, sire. Lorsque vous passâtes au Pizzo en 1810, j’allai vous demander un secours pour achever notre église : je sollicitais 25,000 francs, vous m’en envoyâtes 40,000.

— C’est que je prévoyais que j’y serais enterré, répondit en souriant Murat.

— Eh bien ! sire, refuserez-vous à un vieillard la dernière grâce qu’il vous demande ?

— Laquelle ?

— Celle de mourir en chrétien.

— Vous voulez que je me confesse ? eh bien ! écoutez : Étant enfant, j’ai désobéi à mes parens qui ne voulaient pas que je me fisse soldat. Voilà la seule chose dont j’aie à me repentir.

— Mais, sire, voulez-vous me donner une attestation que vous mourez dans la foi catholique ?

— Oh ! pour cela, sans difficulté, dit Murat ; et allant s’asseoir à la table où il avait déjà écrit, il traça le billet suivant :