Page:Dumas - Le Capitaine Aréna.djvu/66

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temps d’aller remercier les bons pères et régler mon compte avec eux ; je laissai Jadin accompagner notre gouverneur, et je me rendis au couvent.

J’y trouvai le supérieur, qui me reprocha doucement d’avoir sans doute trouvé la cuisine mauvaise puisque nous avions accepté à dîner hors de chez lui. Je lui répondis que la cuisine n’eût-elle point été aussi excellente qu’elle était réellement, nous aurions oublié ce petit inconvénient en faveur de la manière toute gracieuse dont elle nous était offerte ; mais, loin de là, nous étions à la fois satisfaits de la chère et reconnaissans de l’accueil ; cependant nous n’avions pas pu refuser d’aller dîner chez le gouverneur. Le supérieur parut se rendre à nos raisons, et je lui demandai combien nous lui devions.

Mais là, la discussion recommença ; le supérieur avait entendu nous offrir l’hospitalité gratis. Je craignis de le blesser en insistant, je lui fis mes remerciemens pour moi et Jadin ; seulement, en passant devant le tronc du couvent, j’y glissai deux piastres.

Je me rappellerai toujours ce petit couvent avec son air oriental et son beau palmier, qui lui donnaient bien plus l’aspect d’une mosquée que d’une église : cela avait si fort frappé Jadin de son côté, qu’à cinq heures du matin, tandis que je dormais encore, il s’était levé et en avait fait un croquis.

En arrivant chez notre bon gouverneur, je trouvai le dîner servi et chacun prêt à se mettre à table. Le brave homme avait mis à contribution pour nous recevoir la terre et la mer. Nous le grondâmes de faire de pareilles folies pour, des gens qui lui étaient inconnus. Mais il nous répondit que, grâce aux bonnes heures que nous lui avions fait passer, nous n’étions plus des étrangers pour lui, mais bien au contraire des amis dont, dans son exil, il conserverait le souvenir toute sa vie. Nous lui rendîmes compliment pour compliment.

Nous désirions, autant que possible, entrer le lendemain soir, avant la fermeture de la police, dans le port de Stromboli. Aussi avions-nous fixé notre départ à cinq heures et