Page:Dumas - Le Capitaine Pamphile, 1875.djvu/150

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faim, qu’il allait avoir soif ; alors il chercha un ruisseau comme il avait cherché des racines. Par malheur, la chose était plus rare.

Il écouta avec attention : aucun murmure n’arriva jusqu’à lui ; il aspira l’air pour tâcher d’y saisir quelque faible émanation ; mais il n’y avait pas d’air sous cette voûte, toute gigantesque qu’elle était ; il n’y régnait qu’une atmosphère lourde et épaisse, que les animaux et les plantes condamnés à ramper sur la terre respiraient avec effort, et qui semblait insuffisante à la vie.

Alors le capitaine Pamphile prit son parti ; il ramassa un caillou aigu ; puis, au lieu de continuer une quête inutile, il s’en alla d’arbre en arbre, examinant chaque tige avec attention ; enfin il parut avoir trouvé ce qu’il cherchait : c’était un magnifique érable, jeune, lisse et vigoureux. Il le prit alors dans son bras gauche, tandis que, de la main droite, il lui enfonça le caillou aigu dans l’écorce ; quelques gouttes de ce sang végétal et précieux avec lequel les Canadiens font un sucre plus beau que celui de la canne s’en échappa aussitôt comme d’une blessure ; le capitaine Pamphile, satisfait de l’expérience, s’assit tranquillement au pied de sa victime et commença son déjeuner ; puis, lorsqu’il eut fini, il appliqua sa bouche altérée à la plaie dont la sève sortait alors comme d’une fontaine, et se remit en route plus frais, plus dispos et plus vigoureux que jamais.

Vers les cinq heures du soir, à peu près, le capitaine Pamphile crut voir quelques rayons du jour se glisser à travers les ténèbres : sa marche en reprit une nouvelle