Page:Dumas - Le Capitaine Pamphile, 1875.djvu/200

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croisée. La nuit était calme, la rue tranquille ; pas un bruit ne troublait la solitude du quartier, si ce n’est le murmure sourd qui veille incessamment, planant au-dessus de Paris, et qui semble la respiration d’un géant endormi. Alors il referma sa fenêtre et s’aperçut que les plaintes venaient de la chambre même.

Comme il n’y avait que lui et Jacques dans la chambre et que lui n’avait d’autre raison de se plaindre que d’être réveillé, il alla à Jacques ; Jacques ne sachant que faire, s’était amusé à tourner au pied de la table sous laquelle il était couché ; mais, au bout de cinq ou six tours, sa chaîne s’était rétrécie ; Jacques n’en avait tenu compte et avait continué son manège, de sorte qu’il avait fini par se trouver arrêté par le collet, et, comme il poussait toujours en avant sans penser à retourner en arrière, il s’étranglait davantage à chaque effort qu’il faisait pour se dégager. De là les plaintes que Tony avait entendues.

Tony, pour punir Jacques de sa stupidité, l’eût volontiers laissé dans la situation où il s’était placé ; mais, en condamnant Jacques à la strangulation, il se vouait à l’insomnie : il détourna donc la corde autant de fois que Jacques l’avait tournée, et Jacques, satisfait de se trouver les voies respiratoires dégagées, se recoucha humblement et sans bruit. Tony, de son côté, en fit autant, espérant que rien ne troublerait son sommeil jusqu’au lendemain matin ; Tony se trompait, Jacques avait été dérangé dans ses habitudes de sommeil et avait empiété sur sa nuit, de sorte que, maintenant qu’il avait dormi ses huit heures,