Page:Dumas - Le Comte de Monte-Cristo (1889) Tome 2.djvu/200

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qu’il voulait ; et quant à l’argent, trois cents piastres réparties à la troupe faisaient une si pauvre somme qu’il s’en souciait médiocrement.

Il continua donc sa route vers la clairière ; mais, à son grand étonnement, Carlini y arriva presque aussitôt que lui.

— Le tirage au sort ! le tirage au sort ! crièrent tous les bandits en apercevant le chef.

Et les yeux de tous ces hommes brillèrent d’ivresse et de lascivité, tandis que la flamme du foyer jetait sur toute leur personne une lueur rougeâtre qui les faisait ressembler à des démons.

Ce qu’ils demandaient était juste ; aussi le chef fit-il de la tête un signe annonçant qu’il acquiesçait à leur demande. On mit tous les noms dans un chapeau, celui de Carlini comme ceux des autres, et le plus jeune de la bande tira de l’urne improvisée un bulletin.

Ce bulletin portait le nom de Diavolaccio.

C’était celui-là même qui avait proposé à Carlini la santé du chef, et à qui Carlini avait répondu en lui brisant le verre sur la figure.

Une large blessure, ouverte de la tempe à la bouche, laissait couler le sang à flots.

Diavolaccio, se voyant ainsi favorisé de la fortune, poussa un éclat de rire.

— Capitaine, dit-il, tout à l’heure Carlini n’a pas voulu boire à votre santé, proposez-lui de boire à la mienne ; il aura peut-être plus de condescendance pour vous que pour moi.

Chacun s’attendait à une explosion de la part de Carlini ; mais, au grand étonnement de tous, il prit un verre d’une main, un fiasco de l’autre, puis, remplissant le verre :