Page:Dumas - Le Fils du forçat.djvu/151

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dans sa voix, de ne jamais être sûr d’avoir le lendemain le pain et l’oignon quotidiens ! Vous parliez de la charité tout à l’heure, mon bon monsieur ; hélas ! elle n’existe plus sur la terre ; Dieu veuille que nous la retrouvions là haut !

Comme pour démentir cette dernière phrase, Marius mit dans la main du malheureux tout ce qu’il avait d’argent sur lui. Madeleine brûlait du désir de s’associer à la charité de celui qu’elle aimait ; mais elle fouilla en vain ses poches, elle était sortie sans argent.

– Mon brave homme, dit-elle, vous n’êtes pas encore dans un âge où vous deviez désespérer de trouver une condition meilleure que la vôtre ; venez chez moi aussitôt que vous le pourrez ; je verrai ce qu’il sera possible de faire pour vous, et, si vous n’acceptez pas mes propositions, au moins votre visite vous vaudra-t-elle une bonne aumône.

– J’irai, quand ce ne serait que pour vous remercier de ce bon secours que vous m’avez donné, ma belle demoiselle, dit le mendiant avec le ton hypocrite qui venait de lui réussir ; mais, pour vous trouver, il faudrait savoir où vous demeurez.

– Rue Paradis, la maison Riouffe ; tout le monde vous indiquera nos bureaux.

– Un négociant ?

– Oui ; mais Marseille est peut-être un peu loin