Page:Dumas - Le Fils du forçat.djvu/194

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leva vers le ciel avec une expression de désespoir indicible.

– Pourquoi l’avez-vous permis, mon Dieu ? pourquoi l’avez-vous permis ? s’écria-t-elle ; et toi, mon pauvre enfant, qu’as-tu fait !

– De quoi vous préoccupez-vous, ma mère ? J’ai chassé un insolent drôle qui, pour prix d’un service que je lui avais rendu, n’a pas craint de vous insulter, voilà tout. Voyons, nous n’avons déjà que trop peu de temps à nous. Le père peut rentrer d’un instant à l’autre. Hâtez-vous, mère, que je vous console ; hâtez-vous, que je souffre avec vous ; qu’est-il arrivé ? Parlez.

– Ah ! tu ignores ce qu’il en coûte à une mère d’avoir à rougir devant son enfant. Mais cet homme de tout à l’heure, ce malheureux, dis-moi, qu’est-il devenu ?

– Eh ! que vous importe ? C’est de vous et non de lui qu’il s’agit, ma mère.

Millette ne répondit pas ; elle cacha son visage entre ses genoux.

Ce silence de la pauvre Millette augmenta l’anxiété du jeune homme en doublant ses incertitudes. Il n’avait exagéré ni le respect ni la tendresse qu’il ressentait pour celle dont il avait reçu le jour. Plus grave, plus réfléchi qu’on ne l’est ordinairement à son âge, il avait pu apprécier la grandeur de cette vie