Page:Dumas - Le Fils du forçat.djvu/225

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maintenant, il faut que vous décampiez le premier.

– Adieu ! fit Marius incapable de trouver une autre parole dans son âme de plus en plus désespérée.

– Non, pas adieu, tron de l’air ! au revoir, et à demain. Ne me vendez pas ; vous avez vu que je manie assez joliment le couteau, et, si vous essayiez de me trahir, fussiez-vous à trente pas de distance, fussiez-vous entre dix gendarmes, je vous jure de faire mouche dans votre cœur.

Navré de douleur, Marius s’éloignait si rapidement, qu’il n’entendit que la moitié des menaces que le mendiant lui adressait en forme de remerciements.

D’ailleurs, une rumeur confuse venait du village : les lueurs des torches et des flambeaux jetaient aux alentours du chalet leurs clartés sombres et fumeuses. Ce spectacle de l’agitation générale rappela Madeleine au cœur du jeune homme, et le souvenir de celle qu’il aimait lui rendit un peu de courage. Bien que l’entrevue que le fils de Millette venait d’avoir avec son véritable père eût enlevé de son cœur les vagues espoirs qu’il conservait peut-être encore relativement aux projets d’union si chèrement caressés, ce cœur ne se trouvait pas moins rafraîchi en passant du spectacle de cette abjection à la triste et dernière mission qu’il lui restait à remplir, c’est-à-dire