Page:Dumas - Le Meneur de loups (1868).djvu/22

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– Il n’y en a point ; d’ailleurs, je ne la vois que quand je la sens.

– Tu la vois ?

– Comme je vous vois, général.

– Et que fait-elle ?

– Oh ! quant à cela, rien de bon ; elle me piétine sur la poitrine : vlan, vlan, vlan !

– Enfin, où as-tu mis le piège ?

– Le pierge ! Je l’ai mis sur mon estomac, donc !

– Et quel pierge as-tu mis ?

– Oh ! un fameux pierge !

– Lequel ?

– Celui que j’avais préparé pour prendre le loup gris qui venait étrangler les moutons de M. Destournelles.

– Pas si fameux, ton pierge, Mocquet, puisque le loup gris a mangé ton appât et ne s’est pas pris.

– Il ne s’est pas pris, vous savez bien pourquoi, général.

– Non.

– Il ne s’est pas pris parce que c’est le loup noir de Thibault le sabotier.

– Ce n’est pas le loup noir de Thibault le sabotier, Mocquet, puisque tu avoues toi-même que le loup qui venait étrangler les moutons de M. Destournelles était gris.

– Il est gris aujourd’hui, mon général ; mais, du temps de Thibault le sabotier, c’est-à-dire il y a trente ans, il était noir ; à preuve, mon général, c’est qu’il y a trente ans, j’étais noir comme un corbeau, et qu’à présent, je suis gris comme le Docteur.

Le Docteur était un chat auquel j’ai essayé, dans mes Mémoires, de donner une célébrité relative, et qu’on appelait le Docteur à cause de la magnifique fourrure dont la nature l’avait doué.