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OTHON L’ARCHER

et le silence se rétablit. Alors, Hermann, se tournant vers l’estrade où était le prince de Clèves, éleva la voix et lui transmit la demande d’Othon. Elle était si juste et si extraordinaire, qu’elle lui fut accordée à l’instant même, et, cette fois, ce fut Mildar qui sourit, mais avec un air de doute qui prouvait qu’il regardait la chose comme impossible.

Alors Othon posa à terre sa toque, son arc et ses flèches, et alla lui-même d’un pas lent et mesuré examiner le coup ; il était bien ainsi que le marqueur l’avait dit ; arrivé au but, Mildar, qui l’avait suivi, arracha lui-même sa flèche. Frantz et Hermann voulurent en faire autant, mais Othon les arrêta d’un regard : ils comprirent que leur jeune camarade désirait se servir de leurs traits comme de deux guides, et répondirent par un signe d’intelligence. Othon cueillit alors une petite marguerite des champs, l’enfonça dans la cavité formée par la flèche de Mildar, afin, au milieu du rond noir, d’être guidé par un point blanc ; cette précaution prise, il revint à sa place, sans humilité comme sans orgueil, convaincu que, perdit-il le prix, il l’avait disputé assez longtemps pour n’avoir pas de honte à le voir passer aux mains d’un autre.

Arrivé à la limite, il attendit un instant que chacun eût repris sa place. Puis, l’ordre rétabli, il ramassa son arc, parut prendre au hasard une des flèches, quoiqu’un œil exercé eût remarqué qu’il avait été chercher sous