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OTHON L’ARCHER

« Cependant je sentis se dénouer les liens qui retenaient ma langue et je m’écriai :

« — Seigneur, Seigneur ! que votre saint nom soit béni ! »

« Le Christ ouvrit la bouche à son tour, et ses paroles arrivèrent à moi douces comme un chant.

« — Godefroy, mon noble et pieux serviteur, n’entends-tu rien ? » me dit-il.

« — Hélas ! monseigneur Jésus, » répondis-je, j’entends le son de la clochette sainte, qui m’apprend que celle dont le père est mort pour vous, dont le fiancé est mort pour vous, et dont l’oncle est mort pour vous, est en danger à cette heure et n’a plus que vous pour la secourir.

« — Eh bien, que puis-je faire pour toi ? » dit le Christ. « Je suis le Dieu rémunérateur : demande, et ce que tu me demanderas te sera accordé.

« — Ô monseigneur Jésus ! » répondis-je, « je n’ai rien à demander pour moi-même ; car vous avez fait pour moi plus que pour personne. Vous m’avez choisi pour conduire la croisade et délivrer la ville sainte ; vous m’avez donné la couronne d’or là où vous aviez porté la couronne d’épines, et vous avez permis que je mourusse dans votre grâce. Je n’ai donc rien à vous demander pour moi, ô monseigneur Jésus ! maintenant surtout que de mes yeux mortels j’ai contemplé votre divinité. Mais, si j’osais vous prier pour un autre…