Page:Dumas - Les Frères Corses, 1881.djvu/284

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
272
OTHON L’ARCHER

« — Seigneur, Seigneur ! que votre saint nom soit béni. »

« Je me penchai sur lui pour l’embrasser encore une fois ; mais il était sans souffle et déjà endormi dans le Seigneur.

« Je laissai retomber sur lui la pierre qu’un doigt divin avait soulevée ; j’allai m’agenouiller à l’autel, je fis ma prière, et, sans perdre un instant, je résolus de venir à ton secours. Sous le porche de l’église, je trouvai un cheval tout caparaçonné ; une lance était dressée contre le mur : je ne doutai point un instant que l’un et l’autre ne fussent pour moi. Je pris la lance, je montai à cheval, et, pensant que le Seigneur avait confié à son instinct le soin de me conduire, je lui jetai la bride sur le cou et lui laissai prendre la route qui lui convenait.

« Je traversai la Syrie, la Cappadoce, la Turquie, la Thrace, la Dalmatie, l’Italie et l’Allemagne ; enfin, après un an et un jour de voyage, j’arrivai sur les bords du Rhin. Là, je trouvai une barque à laquelle était attaché un cygne avec des chaînes d’or. Je montai dans la barque et elle me conduisit en face du château. Tu sais le reste, Béatrix.

« — Hélas ! s’écria Béatrix, voilà le cygne et la barque qui abordent au même endroit où ils ont abordé alors ; mais, cette fois, malheureuse que je suis, ils viennent te reprendre. Rodolphe, Rodolphe, pardonne-moi !