rai là, du moins. On ne verse pas ainsi tout entier un sang comme celui qui sort de la blessure que vous avez déjà faite.
— Bah ! dit Chicot avec surprise ; vous connaissez ce misérable ?
— Ce misérable est M. le duc de Mayenne, prince égal en grandeur à bien des rois.
— Raison de plus, dit Chicot d’une voix sombre… Mais vous, qui êtes-vous ?
— Je suis celui qui vous a sauvé la vie, Monsieur, répondit froidement le jeune homme.
— Et qui, vers Charenton, m’a, si je ne me trompe, remis une lettre du roi, voici tantôt trois jours ?
— Précisément.
— Alors vous êtes au service du roi, Monsieur ?
— J’ai cet honneur, répondit le jeune homme en s’inclinant.
— Et, étant au service du roi, vous ménagez M. de Mayenne ? Mordieu ! Monsieur, permettez-moi de vous le dire, ce n’est pas d’un bon serviteur.
— Je crois, au contraire, que c’est moi qui suis le bon serviteur du roi en ce moment.
— Peut-être, fit tristement Chicot, peut-être ; mais ce n’est pas le moment de philosopher. Comment vous nomme-t-on ?
— Ernauton de Carmainges, Monsieur.
— Eh bien ! monsieur Ernauton, qu’allons-nous faire de cette charogne égale en grandeur à tous les rois de la terre ? car, moi, je tire au large, je vous en avertis.
— Je veillerai sur M. de Mayenne, Monsieur.
— Et le compagnon qui écoute là-bas, qu’en faites-vous ?
— Le pauvre diable n’entend rien ; je l’ai serré trop fort, à ce que je pense, et il s’est évanoui.
— Allons, monsieur de Carmainges, vous avez sauvé ma vie aujourd’hui, mais vous la compromettez furieusement pour plus tard.