— Napoléon Bonaparte.
— Son nom n’est pas porté sur le livre des entrées.
— Ne faites pas attention, il est avec moi ; c’est un de mes amis.
— Ah ! s’il est avec vous, c’est autre chose…
Plus tard, Talma, à son tour, eut ses entrées aux Tuileries, et plus d’un ambassadeur, plus d’un prince, plus d’un roi, demanda à l’empereur :
— Sire, quel est cet homme ?
Et Napoléon répondit :
— C’est Talma, un de mes amis.
Il est vrai qu’en voyant la facilité de Talma à draper sa toge, Napoléon s’était dit :
— Cet homme-là pourra m’apprendre, un jour, à porter le manteau impérial.
Ce n’était pas le tout d’avoir un premier consul aimant Corneille et Ossian ; ce premier consul avait des frères qui essayaient de devenir poëtes.
Ils n’y arrivaient pas ; mais, enfin, ils essayaient. Il faut tenir compte aux gens de l’intention.
Lucien faisait des poèmes. Ce farouche républicain, qui refusa des royaumes, et qui finit par se laisser faire prince romain, — et prince de quoi ? je vous le demande ! prince de Petit-Chien (Canino) ; — Lucien faisait des poëmes ; il nous reste de lui, ou plutôt il ne nous reste pas un poëme intitulé Charlemagne.
Quant à Louis, il avait un autre tic : il faisait des vers blancs, trouvant cela plus commode que de faire des vers rimés. Il a travesti de cette façon l’Avare de Molière.
Joséphine, la coquette créole, avec sa grâce nonchalante et son flexible esprit, se pliait à tout, laissant faire tout le monde autour d’elle, comme Hamlet, et, comme Hamlet, applaudissant tout le monde.
Talma était un des familiers de cette petite cour bourgeoise. Il y avait parlé de la débutante mademoiselle Georges ; il avait dit sa beauté, les espérances qu’elle donnait. Lucien s’en était monté la tête, et, en véritable saint Jean précurseur, il était